Le mythe WOODSTOCK...♫♪♫♫
Le pavillon des artistes, dont chacun reconnaît l’originalité
de forme et de conception, et la scène monumentale ont été
construits dans les temps. Le son est prodigieux et le ballet des hélicoptères
prouve que, dans des conditions imprévues et exceptionnelles, les organisateurs
ont surmonté la paralysie du réseau routier que n’a pas
su prévenir la police locale.
Bien sûr le spectacle des voitures
abandonnées sur la route et qui rendent la circulation quasiment impossible
pour les citoyens de White Lake est quelque peu choquant, mais le blâme
va aux autorités qui n’ont pas pris les mesures nécessaires
pour faciliter l’accès aux immenses zones de parking qu’ont
louées et payées les organisateurs,et qui sont restées
inoccupées.
Les milliers de jeunes qui viennent se ravitailler en ville ont tous une attitude
correcte et pacifique. Ils répondent avec humour aux remarques parfois
désobligeantes qui leur sont faites sur leurs allures ou leurs tenues.
Ils font calmement la queue dehors comme leur impose le propriétaire
du General Store, payant au prix fort les derniers stocks de la boutique.
D’ailleurs tous les commerces alimentaires des environs ont épuisés
leurs réserves, loin des prix de solde. Seul le bar d’Hector
qui avait prévu l’invasion n’est pas à cours de
bières!!
Jamais le nombre de participants n’a semblé être une menace pour la petite communauté, et, longtemps après leur départ, les commerçants témoigneront que non seulement ils ont fait de très bonnes affaires, mais aucun d’eux ne se souvient avoir encaissé un chèque en bois, et tous les crédits ontété honorés. La nation Woodstock est peuplée d’honnêtes gens. =D
Aucune rumeur d’incident n’est venue non plus du site où
a passé la nuit une population qui fait de Yasgur’s Farm la deuxième
ville de l’Etat de New York. Existe-t-il une autre ville de 500.000
habitants aux Etats-Unis où un week-end de trois jours n’est
l’occasion d’aucun crime?
Alors le dimanche, après que le gouverneur a déclaré
White Lake zone sinistrée, quand le bruit se répand que les
stocks de nourriture sont épuisés, un sentiment de solidarité
se développe avec cette jeunesse. Dans les Bungalows Colonies et les
fermes des environs, des milliers de sandwiches sont préparés
dans des dizaines de familles, tandis qu’un hôtelier de Monticello
fait durcir des centaines d’œufs. Et par les petites routes forestières,les
habitants, leurs camions chargés de provisions, rallient le site du
festival où le concert a repris. Après l’époustouflante
interprétation de With a Little help from my friends de Joe
Cocker, version promise à devenir plus célèbre que l’original
des Beatles, une tornade s’est abattue malgré les fervents «No
Rain» psalmodiés par la foule.
Dans le champs désormais
transformé en immense bourbier, que commence à faire sécher
le soleil d’août,le concert a repris. S’enchaînent
alors des groupes qui vont également marqués ce festival comme
Santana, Ten Years After, Crosby, Stills, Nash & Young. Et lundi matin
à l’aube, Jimi Hendrix entre en scène. Dans la nuit, des
milliers sont déjà partis,mais les 30.000 qui restent sont
gratifiés de l’une des meilleures performances du festival. Jimi
Hendrix au sommet de son art. Quand il attaque The Star Spangled Banner (l’hymne
américain), organisateurs et spectateurs sont tirés de la torpeur
où les a plongés trois jours de musique, de veille, d’intempéries,
d’herbe et d’acide. A travers l’interprétation d’Hendrix,
dont la guitare distord les accords de l’hymne national, chacun ressent
la distorsion de son ego américain.
Maintenant complètement réveillés par les derniers accords
de Hendrix qui clôturent le festival, tous se lèvent, et déjà
conscients d’avoir participé à un rassemblement sans précédents
et qui n’aura pas d’équivalent, les Aquariens se dispersent.
Au contraire des immenses embouteillages provoqués par leur arrivée,
leurs départs se fondent dans le trafic routier qui, chaque matin,
converge vers les tours de Manhattan. Les hélicoptères ont ramené
les artistes en ville, et déjà John Roberts et Joel Rosenman
font face à leurs banquiers dans un bureau de WallStreet.
L’immense majorité des Aquariens constitue désormais au
sein de la société américaine la Nation Woodstock.
Mais au fond d’eux-mêmes, ils ne peuvent oublier les 500.000 autres, encore prisonniers des bourbiers vietnamiens. Rentrés au pays les vétérans fuient à leur tour une société qui ne les reconnaît pas plus qu’ils ne la reconnaissent. Par rejet de leur passé, ils adoptent les cheveux longs et le bandana des peaceniks. Alors au lendemain du festival de Woodstock, combien seront-ils dans les rangs du million de marcheurs pour la paix qui investira Washington le 16 novembre 1969 ?